LA CAFETIÈRE MOKA

La cafetière la plus populaire au monde vit-elle ses dernières heures ? Retour sur un objet iconique et design qui a traversé nos vies et nos cuisines.

Elle a maintenant plus de 85 ans mais il semble impossible de lui donner un âge, pas plus que de lui donner un nom d’ailleurs. Plutôt que “Moka”, les italiens l’appellent affectueusement “machinetta”, nous “cafetière italienne”. Il faut dire qu’on lui doit une fière chandelle. Celle d’avoir fait rentrer l’expresso dans les foyers quand il n’était alors réservé qu’aux gens fortunés ou aux baristi des cafés de quartier. Tout cela grâce à son génial inventeur, Alfonso Bialetti, qui utilisa la vapeur d’eau sous pression pour infuser rapidement le célèbre breuvage. Mais aurait-elle gardé son éternelle jeunesse sans ses huit jolies facettes qui la rendent reconnaissable entre toutes sur un étal ?

Son corps en aluminium et sa poignée en bakélite ont fait entrer le design industriel et la modernité dans les foyers dès les années 30. Elle ne les a plus quittés depuis, passant de la chambre d’étudiant désargenté à la cuisinière de grand-mères nostalgiques. Dans les années 50, sa période faste, elle s’est affublée de ce drôle de personnage à moustaches levant le doigt comme on hèle le garçon de café, représentation cartoonesque d’Alfonso Bialletti. Ce n’est pas ce qu’elle a fait de mieux. Mais elle a réussi la gageure d’être un des produits ménagers le plus populaires au monde tout en étant exposé dans des musées comme le Science Museum de Londres.

On a tous une histoire avec elle et dans l’oreille son petit chant strident qui chuchote “le café est prêt”. Malgré le succès, elle est restée abordable et s’est adaptée à toutes les tailles de foyers. « De un à dix huit cafés » disait la réclame selon la taille choisie, avec toujours la même promesse : faire couler dans nos tasses de citoyens pressés un jus bien serré qui allait nous réveiller pour la journée.

Mais les dosettes sont arrivées qui ont juré sa mort. Bien sûr elle tente de résister en colorant sa robe, en jouant l’écolo et en se réinvantant chez son cousin Alessi. Mais cela suffira-t-il à enrayer sa chute, quand tant de contrefaçons donnent maintenant une bien mauvaise image d’elle ? Les icônes ne meurent jamais… dans nos souvenirs tout du moins.

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Crédits © 2020 Texte – Eric Foucher
Illustration – Nastia Sleptsova
Article issu de la Revue n°l selon ARCHIK