LE SAINT-GEORGES | CLAUDE GROS

L’architecte Claude Gros dessine une construction composée de deux blocs distincts et perpendiculaires : le Saint-Georges. Ce complexe familial aux airs corbuséens verra le jour en 1962.

L’architecte marseillais Claude Gros (1925-2016) est un élève brillant au sein de l’atelier Castel-Hardy, et fait partie de la génération des architectes formés dans l’immédiateté de l’après-guerre.
Auteur d’importants programmes de logements à  l’architecture rationnelle, où les structures s’expriment par des tracés rigoureux. Sa sensibilité aux lieux de vies partagés lui permet de s’emparer des programmes d’Unité d’Habitation, tout en partageant la volonté de Le Corbusier à la même époque, de créer un art de vivre communautaire.

Il met en avant la nécessité de la préfabrication, et marque le paysage marseillais avec de nombreux bâtiments, comme le Parc Kalliste (15ème) en 1958, La Granière (15ème) en 1961, Castel Roc (10ème) en 1973, La Benausse (14ème) où il réalise des panneaux architectoniques préfabriqués en trois dimensions, ou encore Le Marceau (3ème) en 1964 qui reçoit le label du Patrimoine du XXème siècle en 2006.

À la fin des années 50, l’agence de construction de logements la Savoisienne entreprend de construire un ensemble immobilier sur un terrain en triangle situé dans le quartier de Saint-Lambert.
L’architecte Claude Gros dessine une construction composée de deux blocs distincts et perpendiculaires, d’une hauteur de 9 étages pour l’un, et 19 pour l’autre. Le complexe familial aux airs corbuséens verra le jour en 1962. Le Saint-Georges compte en ses murs : une église existante avant le projet, une école dont la cour de récréation se trouve au deuxième étage, une salle de congrès de 700 places, une galerie commerçante, l’hôtel le Royal Saint-Georges, un restaurant panoramique, tout en ajoutant à cela 222 logements,traversants pour la plupart.

À l’exception du restaurant, l’ensemble du programme est logé dans une nappe basse qui joue le rôle de socle aux logements, tout en s’ouvrant sur l’espace public par une façade très ouvragée et variée. La structure est constituée de poteaux et d’allèges qui rythment la paroi, laissant libres les variations de division et les superpositions de fonctions différentes. L’église, dont le cloché perce le ciel, est sertit d’une verrière signée par le maître verrier Max Ingrand. Le restaurant panoramique est aujourd’hui remplacé par des bureaux dont la vue en fait un point exceptionnel d’observation de la ville.

Avec ses 66 mètres de hauteur, le Saint-Georges devient alors l’un des immeubles les plus hauts de la ville, dont les façades tramées resteront un des traits caractéristiques de l’architecture de Claude Gros.

INFORMATIONS PRATIQUES

97 avenue de la Corse
13007 Marseille

Photographes – ©David Coquille – ©Vieux Marseille – ©Jaqueline Poggi

 LA STATION SERVICE | JEAN PROUVÉ

À Marseille, Jean Prouvé trouve aujourd’hui sa place au cœur des calanques, au sein de la Friche de l’Escalette et sur les bords du chemin de Sainte-Marthe.

Appelé le « constructeur », Jean Prouvé (1901 – 1984) est un ouvrier métallurgiste français, architecte et designer autodidacte affirmé du XXème siècle. Il devient un symbole du design des années 50 au même titre que Le Corbusier et Charlotte Perriand. Guidé par la philosophie d’allier l’art à l’industrie, il voue 60 ans de sa carrière à la création et devient l’un des pionniers de la production innovante. Développant la « pensée constructive », ce prodigieux inventeur apporte au design des méthodes de fabrication industrielles, permettant au mobilier d’être aisément assemblé et démonté sans pour autant perdre en qualité esthétique.

Mais plus inédit encore, dans le 14ème arrondissement, au 23 chemin de Sainte-Marthe, demeure aujourd’hui encore la station-service imaginée par Prouvé à la fin des années 60, fruit d’une commande du pétrolier Total afin de se démarquer de ses concurrents et créer une véritable image de marque.

Sous l’image moderne et fonctionnelle d’une architecture industrialisée, Prouvé conçoit un bâtiment décagonal de deux étages, à l’auvent circulaire servant à protéger les pompes à essence. Construite en temps records grâce aux principes d’assemblage de Prouvé, sa structure rayonnante en tôle galvanisée repose sur un fût central et sur des poteaux périphériques, finissant son assemblage par des panneaux de polyester et de verre.

Un bijou architectural à l’abri des regards, encore peu connu dans l’horizon marseillais.

À Marseille, Jean Prouvé trouve aujourd’hui sa place au cœur des calanques, grâce au galeriste, et propriétaire de la Friche de l’Escalette, Eric Touchaleaume. Ce passionné spécialiste du travail de Prouvé, expose à ciel ouvert dans les vestiges d’une ancienne usine de plomb, les iconiques pavillons mobiles de l’architecte. Le pavillon de Lorraine et le bungalow du Cameroun, petites maisons boisées à l’architecture légère et à la structure d’acier, servent aujourd’hui d’atelier d’artiste, joliment habillé de mobilier signé Charlotte Perriand et Jean Prouvé.

INFORMATIONS PRATIQUES

Station service
23 chemin de Sainte-Marthe
13014 Marseille

Friche de l’Escalette
route des impasses de l’Escalette
13008 Marseille

friche-escalette.com

Photographes – ©C Baraja – ©Damien Boeuf – ©Villa Cavrois

LES ESPACES D’ABRAXAS | RICARDO BOFILL

Cet édifice à la fois passionnant et déroutant, conçut entre 1978 et 1983, accueille plus de 600 logements et une superbe vue du 17ème étage sur la Tour Eiffel.

Fils d’architecte, Ricardo Bofill est né en 1939 à Barcelone. Il étudie l’architecture à Barcelone puis à Genève et adhère rapidement au courant post-moderne. En 1963, il s’entoure d’un groupe d’architectes, ingénieurs, sociologues et philosophes, et crée le Ricardo Bofill Taller de Arquitectura. Ensemble, ils proposent des espaces qui défient les normes culturelles, sociales et architecturales de l’époque, concevant une méthodologie pointue mais organique basée sur la formation géométrique des éléments dans l’espace.

Le siège n’est autre que « La Fàbrica », une ancienne cimenterie Barcelonaise à l’architecture emblématique. Rebel et utopique, il œuvre contre « une architecture de masse », sans identité, et pense de nouveaux quartiers urbains, notamment en France avec des logements sociaux à l’architecture folle entre Renaissance et Antiquité, tels que les Espaces d’Abraxas à Noisy-le-Grand.

À contre-courant, il œuvre sur ce projet appelé aussi Le Palacio. Cet édifice à la fois passionnant et déroutant, conçut entre 1978 et 1983, accueille plus de 600 logements et une superbe vue du 17ème étage sur la Tour Eiffel.
Cet ensemble à l’atmosphère futuriste se compose de 3 bâtiments colossaux : le Palacio, le Théâtre et l’Arc qui se parent de formes géométriques et de teintes rosâtres, contrastant avec les façades modernistes en structure béton. Il imprègne la ville de son empreinte dans un style spectaculaire marqué par la théâtralité et la démesure.

Une promenade dans ce complexe est une expérience unique et surréaliste, éveillant tous nos sens.

INFORMATIONS PRATIQUES

6 place des Fédérés
93160 Noisy-le-Grand

ricardobofill.com

Photographes – © Jacques Pavlovsky – © Grégori Civera

VILLE D’HIVER

Redonner vie à un lieu laissé pour compte est un magnifique pari. Ancienne usine de la Compagnie Générale des Eaux d’Arcachon reconvertie en hôtel, la Ville d’Hiver promet un véritable bond hors du temps.

L’âme de la Ville d’Hiver est palpable – celle de l’hôtel tout autant que celle du quartier qui lui donne son nom. A l’heure où la maison souffle ses dix premières bougies, elle offre un séjour à travers les siècles. Une fois sa voiture garée, son train débarqué et ses valises posées, il suffit au visiteur de se laisser porter. Ici, tout se découvre à pied. On rejoint la mer en dix minutes, tandis que la forêt de pins jouxte directement la propriété. Le quartier, résidentiel, est un havre de paix du plus bel effet qui porte dans sa mémoire plus de cent ans d’histoire.

Retour dans le passé. En 1865, Emile et Isaac Pereire, entrepreneurs des chemins de fer, fleurent l’explosion du tourisme sur le Bassin d’Arcachon. Alors que la ville triple sa population en été, les deux frères cherchent à rentabiliser leur investissement 365 jours par an. Une idée ne tarde pas à germer : à une époque où la pénicilline n’a pas encore été découverte, les sanatoriums sont encore ce qu’il se fait de mieux pour soulager les tuberculeux. La côte Atlantique n’en compte alors aucun. Eurêka ! Plus de 300 villas cossues destinées aux malades et à leurs – riches – familles sortiront de terre en un temps record sur les hauteurs d’Arcachon. Bienvenue à la Ville d’Hiver.

En 2020, le quartier n’a rien perdu de sa superbe – seulement ses malades. Au gré d’une balade le long de ses petites rues sinueuses – on dit qu’elles ont été dessinées afin d’empêcher tout courant d’air de se créer, nocifs pour les tuberculeux – une architecture singulière se dévoile. Pas une maison ne se ressemble trait pour trait ! Ce joyeux pêle-mêle hybride emprunte aux styles néo-gothique, mauresque, à la maison coloniale et même au chalet suisse leurs attributs distinctifs qui donnent son caractère unique à chaque villa. Ces maisons, que l’on dit “arcachonnaises”, et leur quartier, sont aujourd’hui inscrits à l’inventaire des Monuments Historiques de France.

C’est donc au cœur de cette ville dans la ville que se sont installés Nathalène et Olivier Arnoux. Leur hôtel, ils l’ont découvert sous les ronces. S’ils pensaient s’établir du côté du Cap Ferret, ils tombent sous le charme de l’ancienne usine élévatrice de la Compagnie Générale des Eaux, édifiée en 1884 et propriété de la mairie depuis sa mise hors-service. Le bâtiment est nu, en friche, dépourvu de vie. Le pari est de taille : faire revivre tout un pan de l’histoire d’Arcachon. En 2009, après dix mois de travaux, le couple inaugure un hôtel flambant neuf, qui semble avoir pourtant toujours existé. Si l’usine abrite désormais les lieux de vie communs, ce sont bien dans deux nouveaux bâtiments créés ex-nihilo que s’imbriquent les chambres. Un tour de force pour l’architecte Emmanuel Graffeuil qui, un siècle plus tard, a su redessiner les contours de l’architecture sans pareille du quartier. Une villa d’époque adjacente à la propriété complète l’offre d’hébergement qui comprend dix chambres, en tout.

Conjuguant les styles et les époques, l’hôtel la Ville d’Hiver semblerait dater lui aussi de 1884, sans paraitre démodé. Prônant une esthétique intemporelle, les lieux se parent d’un savant mélange de rééditions de design du début du siècle, avec notamment une belle sélection de mobilier de l’éditeur danois Gubi, qui apporte la juste touche de modernité, et de meubles chinés sur les brocantes ou dans les greniers familiaux. Les murs s’habillent de toiles d’artistes locaux ou de reproductions authentiques de grands maîtres. Le bois vient se frotter au cuir, les tissus irlandais jonchent les banquettes, la couleur s’étale sur de grands tapis et de larges bouquets de fleurs. Avec un peu de flair, on se surprend à déceler un côté british à l’ensemble, le mariage des couleurs – sols bleu roi par-ci, touches audacieuse de vert, de violet et de magenta par là – faisant foi d’un certain anticonformisme. Touché : Nathalène Arnoux est une fervente amatrice du style éclectique des intérieurs d’Outre-Manche.

Autre fait marquant à la Ville d’Hiver : la douceur de son atmosphère. Réminiscence du passé curatif du quartier ou véritable état d’esprit, tout n’est que quiétude. L’écrin, certes, y est pour quelque chose : les moquettes au sol adoucissent les pas, le bois omniprésent rappelle les maisons de famille, la lumière – du jour ou artificielle – saupoudre le tout d’une chaleur irrésistible.
Les services n’en déçoivent pas moins. L’accueil se fait avec le sourire aux lèvres, grâce à un personnel fidèle à la maison depuis son ouverture. Le restaurant, un bistronomique, sert une cuisine authentique et généreuse où les locaux se rendent souvent en pèlerinage – l’adresse est une des meilleures d’Arcachon. Le spa, co-créé avec la marque de cosmétiques éco-responsables et naturels Dr. Hauschka, prolonge la détente avec des soins du visage et des massages de haut vol, couronnés d’un hammam. L’option piscine est aussi des plus délectables : creusée dans l’ancienne cuve de l’usine des eaux, elle se trouve à l’abri des courants d’air, comme cachée sous une marée d’herbes folles. Après quelques brasses toniques, on se love dans les fauteuils style Strandkorb, ou “corbeille de plage”, très appréciées des plages fraîches d’Europe du Nord, idéals pour se perdre dans l’intrigue d’un bon livre.

Profondément culturel, l’hôtel aime convier ceux qui placent l’art au coeur de leurs vies. Les expositions de photos et de peintures s’enchaînent mais ne se ressemblent pas. On croise dans les couloirs des écrivains assignés à résidence – l’hôtel édite des recueils de nouvelles régulièrement. Les pièces de décoration ont souvent une histoire, à l’instar de ces vases exposés dans le salon, façonnés par un surfeur rencontré sur une plage de Californie. L’été, c’est au bord de la piscine que l’on s’attarde pour écouter un concert a capella. À l’image de sa première vie, la Ville d’Hiver revigore et apaise corps et esprits.

INFORMATIONS PRATIQUES

20 avenue Victor Hugo 33120 Arcachon
05 56 66 10 36
@hotelvilledhiver

 

Photographe – Alexis Atteret
Texte – Fanny Liaux

À HAUTEUR D’ARBRES

Alors qu’il devient urgent de reconsidérer le rapport de l’Homme à son environnement, quelques initiatives architecturales avant-gardistes nous prouvent qu’il est bel et bien possible d’aborder cet enjeu avec intelligence, créativité et subtilité. Parmi elles, la villa imaginée par Lacaton & Vassal, au Cap Ferret il y a déjà trente ans.

Plaisir régressif ou rêve d’aventurier, la vie sous la canopée ne se résume plus à quelques cabanes imaginées par les enfants dans les branches. Elle est devenue réalité pour de nombreux adultes soucieux de se reconnecter à la terre. Encore faut-il que ces habitations hors-normes soient conçues intelligemment.

Au bord de l’eau, du côté du bassin d’Arcachon, les architectes Anne Lacaton & Jean Philippe Vassal font le pari, dans les années 90, de concevoir une maison en inversant le rapport de force entre l’Homme et la nature. Cette fois, c’est à l’humain de s’adapter à son environnement et non l’inverse. Lorsque le projet leur est confié, le terrain, inoccupé depuis longtemps, est l’une des dernières parcelles non bâties en première ligne sur le bord du Bassin. Sa topographie naturelle n’est pas des plus évidentes : une dune de sable dressée, surplombant l’océan, recouverte de 46 pins, d’arbousiers et de mimosas. Le défit est lancé : comment construire sans aplanir ni déboiser, en préservant l’intégralité de la dune et de sa végétation ?

Pour éviter les terrassements dégradants et la coupe des pins, douze micro-pieux sont enfoncés dans le sable jusqu’à dix mètres de profondeur. Prenant appui sur ces fondations, une charpente métallique est érigée entre les arbres, qui vont alors structurer l’intérieur de la maison et définir les espaces.
« Les pins sont conservés, y compris ceux situés dans l’emprise de la construction. Ceux-ci traversent la maison dans des réservations adaptées à leur balancement, à leur développement et à leur maintien en bon état sanitaire. » précisent les Lacaton-Vassal, comme on se plait à les appeler dans le milieu.

Une élévation qui permet, non seulement de jouir d’une vue imprenable, mais surtout de préserver l’état des sols et de prendre possession du paysage. Une communion menée d’une main de maître, dans laquelle tout le monde se retrouve.
Pour parfaire cette intégration au site, la sous-face et les façades de la villa sont constituées de larges baies et de plaques d’alumium, répercutant la lumière environnante et créant des jeux de transparence. Le toit, quant à lui, fait office de terrasse.

Au-delà d’une performance esthétique et éco-responsable, la prouesse de ce projet réside également dans sa démarche minimaliste et économe. A travers ce chef d’œuvre architectural, Lacaton et Vassal prouvent qu’il est possible de concilier optimisation budgétaire, respect de l’environnement et bien-être des occupants. “ Moins de matière, c’est aussi moins de coût, et c’est une façon totalement directe de mettre en œuvre les choses, d’assumer les matériaux, d’assumer les assemblages : « cette performance devient aussi une qualité esthétique.”

expliquent-ils. Une modestie des moyens couplée à une discrétion dans l’intervention, qui feront la renommée du cabinet.
Car la structure sur pilotis et le bardage métallique du bâtiment, de facture simple et peu coûteuse, permettent d’alléger le poids de la maison et d’éviter le recours à des fondations aussi onéreuses que complexes sur ce type de terrain meuble. Même approche économe pour l’ensemble des matériaux et assemblages, volontairement laissés bruts et apparents.

En 1998, c’est un véritable coup de maître que les Lacaton-Vassal réussissaient, puisque pour une superficie de 180 m² et 30 m² de terrasse, le budget total alloué était de… 123 000 €.
Un chef d’œuvre bâti sur une réelle vision et des convictions propres, aujourd’hui inscrit dans la liste des classiques de l’architecture.

INFORMATIONS PRATIQUES

MAISON, CAP FERRET
Architectes : Anne Lacaton & Jean-Philippe Vassal
Site : Lège, Cap-Ferret
Maître d’ouvrage : Privé
Date : Livraison 1998
Superficie : 180 m², terrasse 30 m²
Coût : 123 000 € HT

Texte – © Emmanuelle Oddo
Photos – © Philippe Ruault

SIMON POINTILLART

De l’aménagement, à la décoration, jusqu’à la conception du mobilier, le Studio Simon Pointillart Design signe des réalisations sur-mesure, pensées dans les moindres détails.

Simon Pointillart s’est formé à de l’école de Design de Nantes-Atlantique. Ses expériences à Paris au sein d’agences telles que Malherbe Design ou e|n|t|design lui ont permis de participer à de beaux projets, notamment la signalétique du Musée du Quai Branly ou la signalétique piétonne du quartier de la Défense. Il a aussi œuvré pour le musée d’art islamique de Doha au Qatar, et repensé des espaces pour la Maison H. Actuellement, le Studio travaille à la reprogrammation de la signalétique de la Clinique Pasteur à Toulouse.

Ses différents projets le mènent à poser ses valises à Toulouse en 2011, où Il crée son studio de design en 2015. Simon Pointillart se définit comme « un designer entre l’architecte d’intérieur et le graphiste, qui reste à l’écoute de ses clients et aime à travailler les petits détails qui font la différence ».

Du design d’espace, au design global, au retail ou encore à la signalétique, il donne du sens à ses projets en alliant matières, couleurs et lignes architecturales. Simon aspire à « concevoir des objets ou des espaces pour servir un discours, tout en respectant le bâti ou l’environnement dans lequel ils s’inscrivent ».

ON AIME

Sa pluridisciplinarité et son souci du détail.

INFORMATIONS PRATIQUES

Simon Pointillart

Découvrez son univers
simonpointillartdesign.com

BAST

BAST, pour Bureau Architectures Sans Titre. Fondé à Toulouse en 2013, ce bureau inédit a choisi pour nom l’anonymat, cadre d’une pratique dans laquelle l’individualité s’efface au profit de l’expression collective.

Il y a un an, BAST figurait parmi les vingt lauréats des AJAP 2018, concours biennal d’architecture et de paysagisme organisé par le ministère de la Culture. Si le bureau a été fondé par Laurent Didier et Mathieu Le Ny, l’expérience dépasse à présent ces deux noms. Dans cette aventure, la hiérarchie est inexistante, les projets collectifs, et l’association constitue une fin en soi. Une posture hautement revendiquée par le bureau, tout comme son esthétique radicale. Découverte d’une agence peu banale, en perpétuelle remise en question.

E—O Combien de personnes constituent aujourd’hui le bureau BAST ?

L & M Nous sommes trois associés, épaulés de deux collaborateurs stagiaires. BAST a été fondé en 2013, nous avons d’abord été deux, puis trois, puis quatre, puis cinq, puis à nouveau trois. Il y a inévitablement une évolution du nombre d’associés dans le temps, puisque nous sommes assez ouverts à toute forme de rencontre qui permettrait de faire évoluer le bureau, et nous restons volontairement flexibles. Nous privilégions l’association plutôt que d’embaucher des architectes, tout simplement pour éviter les hiérarchies.

D’où vient cette volonté du collectif ?

 

Dés la création du bureau, il y a eu l’envie de garder la possibilité d’une structure mouvante dans le temps. Le fait que le bureau ne portait pas notre nom permettait que chacun puisse venir travailler un temps, puis repartir pour d’autres opportunités. Nous ne voulions pas figer les choses, d’où un nom plus générique. Mais nous pensons que cela est aussi simplement lié à une tendance actuelle et récente, dans les agences d’architecture surtout, de faire disparaitre la personnalité au profit d’une méthode de travail. Les hiérarchies marquées sont presque désuètes finalement. Nous voulions incarner cette évolution de notre temps.

 

Comment s’organise l’association autour d’un projet ? Comment prendre décisions et les réaliser en collectif ?

 

Quelques soient les projets, nous travaillons de la même manière: nous définissons un binôme en charge du projet – il s’agit chaque fois d’un nouveau binôme, permettant de croiser les regards – mais nous sommes tous impliqués dans la phase de conception. Dès le démarrage, nous produisons tous des documents qui permettent de s’approprier le projet, partager nos connaissances et nos envies, pour finalement identifier plusieurs postures et hypothèses, et choisir ensemble les plus intéressantes. Quand arrive la phase de réalisation, le binôme en charge reprend la main sur le chantier, mais nous poursuivons ces réunions collectives tant qu’il reste des choix à faire. Le fait d’être à plusieurs permet de faire émerger des logiques plus rationnelles que subjectives.

Vous aimez parler de votre volonté de toujours « interroger les possibles ». Comment questionne-t-on un lieu, des idées ou un projet ?

Étant plusieurs, on ne perçoit pas toujours les mêmes choses, ce qui nous oblige à croiser les points de vue, à avoir une réflexion qui aille au-delà du sentiment individuel. On filtre les idées et hypothèses de chacun jusqu’à atteindre un essentiel qui rende le projet efficace, pragmatique. Tous les choix sont faits à l’unanimité, et à partir du moment où une décision convient à trois personnes, il y a plus de chance qu’elle soit rationnelle que si elle ne convient qu’à une seule. C’est là la force du collectif : parvenir à trouver une seule action qui réponde à l’ensemble des contraintes liées au site, au programme et à l’économie du projet.
Et cette méthode de travail est pour nous déjà une finalité. Cette manière de travailler collégialement définit tous nos projets : ce n’est pas tant le résultat formel qui nous intéresse, mais la manière dont nous y parvenons.

Dans ces projets où l’on court souvent après le temps, les décisions collectives ne sont- elles pas trop fastidieuses ? Serait-ce leur limite ?

Le fait que les décisions soient prises à l’unanimité prend beaucoup de temps, c’est sûr. Mais ce qui est perdu dans cette phase de conception initiale est gagné par la suite, dans le déroulement et la réalisation du chantier.
Avec l’expérience du collectif, et la culture commune que nous partageons, nous arrivons aussi à nous mettre d’accord de plus en plus vite. Et surtout, nous gagnons du temps par le seul fait d’être à la fois les concepteurs et les réalisateurs du projet. Ce qui n’est pas le cas dans une organisation hiérarchisée : lorsque l’on délègue à d’autres personnes, la transmission d’information n’est pas totale, tandis que chez BAST, le collectif conçoit, dessine et réalise lui-même. Il maîtrise toutes les phases.

Votre architecture est souvent qualifiée de « radicale », d’ « éthérée ». On vous associe volontiers à la Nouvelle École Brutaliste. Est-ce une esthétique que vous défendez et pourquoi ?

Nous partageons cette esthétique tout simplement parce qu’elle découle de notre contexte de travail et des projets sur lesquels nous aimons travailler : des projets peu bavards, qui s’en tiennent au minimum, qui sont principalement structurels. Mais cette esthétique à laquelle on nous associe n’a jamais été notre objectif premier, elle tient sûrement des premières commandes que l’on nous a confiées, toutes liées à une économie de projet fragile, qui nous poussaient à toujours proposer le maximum avec le minimum d’argent. En travaillant ainsi, on se retrouve souvent à dépouille tout ce qui n’a pas d’utilité structurelle, tout ce qui est second œuvre – doublage, peintures, faïences… On se retrouve alors avec une esthétique marquée par des éléments bruts. Une esthétique qui nous convient parce qu’elle parle d’elle-même. Elle parle de ce qui est nécessaire, et se passe de commentaires.

Ce qui est intéressant également, c’est qu’elle convient aux gens à qui l’on s’adresse. Les clients comprennent le mécanisme : l’économie de projet implique de faire des choix qui privilégient la qualité de la construction. Dans la répartition du budget, nous allons toujours privilégier les volumes – être généreux dans les ouvertures, les vitrages par exemple – plutôt que la finition de surface. Nous travaillons vraiment sur la base, car tout le reste peut évoluer dans le temps et être facilement modifiable en fonction des modes et des goûts.

En quoi cette recherche de l’essentiel est- elle pour vous plus intéressante qu’un projet ultra dessiné ?

Les choses dessinées ne nous gênent pas, mais ce ne sont pas des choses que nous pouvons partager à plusieurs car elles relèvent du subjectif. Chez les architectes d’intérieur ou les décorateurs, le nom est d’ailleurs plus important, car il va incarner un style. Le subjectif est peut-être ainsi la limite du collectif, mais une limite dont on est conscient et qui nous va.
En ce qui nous concerne, même l’aménagement intérieur – cuisines, salles de bains, placard – est géré d’une manière très retenue, parce que la pédagogie reste la même. Nous nous souvenons avoir travaillé sur une boutique de la marque Sessùn (en association avec l’agence NP2F), à Toulouse, pour laquelle nous n’avionspas dépensé la totalité du budget initial, et nous ne voyions pas l’intérêt de dépenser plus pour des choses qui seraient devenues hors projet.

Il y a-t-il des matériaux qui vous permettent mieux que d’autres de parvenir à cette quête de l’épure ?

Nous aimons utiliser des matériaux assez standards, et des procédés industriels classiques – comme l’acier galvanisé plutôt que thermolaqué par exemple – mais c’est dans leur mise en œuvre que nous nous distinguons, car s’ils sont le plus souvent destinés à être cachés, nous faisons au contraire le choix de les laisser apparaître. Un mur en parpaing ou un sol en béton brut ne sont à la base pas faits pour être montrés, mais si on les travaille avec l’intention contraire, on se rend compte qu’il y a une attention particulière qui est mise dans la réalisation, et cette qualité n’a plus besoin d’être masquée. Elle se suffit à elle-même.
C’est aussi l’occasion de mettre en avant le travail des artisans : on a tendance à faire appel pour ces postes à une main d’œuvre peu qualifiée, et très peu valorisée ni considérée car son travail est destiné à l’invisible. Mais à partir du moment où l’on met à nu ces éléments, on se rend compte que ces artisans savent faire mieux.

Nous ne portons pas pour autant un jugement de valeur sur l’esthétique d’une brique ou d’un parpaing. Ce qui nous plait, c’est de prendre le matériau tel quel et de le mettre en œuvre de façon soignée. Même chose pour les réseaux, qui sont souvent mis dans des doublages : ils peuvent tout à fait rester apparents s’ils sont ordonnés, tirés droits… mais cela implique une grande rigueur dans le travail.

INFORMATIONS PRATIQUES

Crédits © 2020 Texte – Emmanuelle Oddo
Photo – © Anna Mas
Article issu de la Revue n°2 selon ARCHIK

PHILIPPE RAHM

Comment le blé a-t-il engendré la ville ? Comment les petits pois ont-ils fait s'élever les cathédrales ? Que les dômes doivent-ils à la peur de l'air stagnant ? Comment le pétrole a-t-il fait pousser des villes dans le désert ? Comment le Co2 est-il en train de transformer les villes et les bâtiments ?

Dans son «Histoire Naturelle de l’Architecture», publiée chez d’A en 2020, l’architecte Philippe Rahm propose en treize chapitres une relecture de l’évolution de l’architecture, de ses figures et de ses mouvements, ignorant volontairement les déterminants culturels pour mieux souligner les causes naturelles, physiques, biologiques ou climatiques. Une approche ambitieuse qui cherche à imposer un changement de paradigme pour mieux construire et appréhender les défis environnementaux actuels. Et l’architecture climatique, de redéfinir la notion du beau..

E—O Votre ouvrage, intitulé « Histoire Naturelle de l’Architecture », propose de porter un autre regard sur l’architecture. Il s’agit ici d’étudier l’acte de bâtir, du néolithique à nos jours, d’un point de vue scientifique. Qu’est-ce qui vous a poussé à vouloir bousculer les convictions et les préceptes établis, basés au contraire sur des données sociales, culturelles ou politiques ?

P— R Nous assistons aujourd’hui et depuis les années 1990, à un grand retour du monde physique, notamment porté par la problématique du réchauffement climatique dû à l’activité humaine. Tout d’un coup, l’être humain ne se trouve plus dans un monde uniquement culturel ou social : la contrainte naturelle redevient palpable — la pandémie actuelle la rend encore plus visible. Ce phénomène touche très fortement l’architecture et l’urbanisme puisque 39% des émissions globales du CO2 viennent du secteur du bâtiment. Les architectes sont donc largement impliqués à ce niveau-là. Ce phénomène implique donc un retour des sciences naturelles dans notre champ d’activité et de réflexion, et une rupture avec les sciences uniquement sociales ou politiques.

« Les antibiotiques ont permis le retour à la ville » : dans votre ouvrage, le lien entre la médecine et l’architecture parait effectivement évident, les exemples sont nombreux et les arguments édifiants. Pourquoi cette approche scientifique avait-elle été négligée ?

Entre les années 1950 et les années 2000, les questions physiques ou naturelles n’étaient plus au cœur des débats. On considérait qu’elles avaient été résolues par le charbon et le pétrole, qui ont complètement modifié notre rapport au monde : nous vivons avec une énergie considérable, dont nous ne disposions pas avant le XIXème siècle, qui nous permet de transporter, manger, construire, monter des escaliers… En architecture, cela a influencé les formes mais aussi notre rapport au monde extérieur, à la température notamment, avec l’apparition du chauffage central, puis de l’air conditionné. À partir de 1950, cette puissance de l’énergie fossile n’est pas seule à transformer le monde : l’apparition des antibiotiques et des vaccins, sans lesquels nous étions extrêmement vulnérables, permet à la population mondiale de tripler, et à notre espérance de vie de doubler.

Les antibiotiques et le charbon —  pour simplifier les choses —  ont alors ouvert un monde dans lequel les sciences naturelles ont perdu leur force : nous nous sommes davantage concentrés sur une dimension super-structurelle, pour parler avec un langage marxiste : la morale, l’esthétique, le social, le politique. L’architecture, de la même manière, est devenue très symbolique, narrative, métaphorique : elle servait alors à exprimer des choses, à raconter des histoires. La pensée critique de cette époque-là s’est 1 développée de la même manière, mettant de côté la part infrastructurelle, matérielle, du monde. C’est la période du post-modernisme : les villes sont construites comme des œuvres d’art et non plus comme des greniers à blés, les bâtiments sont pensés comme des constructions sociales ou esthétiques, et non plus comme des abris contre la pluie ou le froid. Là est le principal changement. Mais aujourd’hui, face aux enjeux écologiques ou sanitaires, ces outils super-structurels se révèlent inefficaces : nous ne pouvons répondre aux enjeux actuels par le symbolisme. Il faut agir à un niveau matériel, scientifique.
D’où ce déplacement des sciences sociales vers les sciences naturelles, pour repenser les plans des villes et des bâtiments, prenant en compte la chaleur, la circulation de l’air, la pollution… La science redevient primordiale pour répondre à ces problèmes tangibles. La pandémie actuelle illustre bien les réponses nécessaires que doit par exemple apporter l’architecture en termes de ventilation de l’air — qui redevient alors un sujet de design, et de réflexion esthétique.

 

Plus largement, l’urgence climatique et la crise sanitaire actuelle posent la question du rôle de l’architecture dans le bien-être de ses habitants, et de sa mission disons « organique ». Déjà dans votre précédent ouvrage « Architecture Météorologique », vous proposiez de travailler non plus sur des formes à habiter mais des « climats à habiter » : l’architecture pourrait- elle réellement constituer un remède naturel aux maux actuels de notre société ? les réaliser en collectif ?

Oui, on peut aller plus loin et se dire que plutôt que de travailler avec des formes géométriques ou des outils narratifs, on peut travailler directement avec des outils climatiques : se dire que la convection, la conduction, l’évaporation, la pression, tous ces termes physiques peuvent être des outils de composition et de dessin du projet d’architecture. Pour cela, il faudrait que les architectes fassent intervenir les ingénieurs et les scientifiques non plus comme support technique mais comme moteur même de la forme et du design. Encore une fois, on retrouve ce type de collaborations avant l’époque post-moderne. Quand Palladio conçoit la villa Rotonda, il crée un dôme pour évacuer l’air chaud et dessine quatre pièces : une au nord pour l’été, au sud pour l’hiver, à l’est pour le matin, à l’ouest pour le soir… Cette forme très géométrique est avant tout issue de considérations climatiques et non pas esthétiques. On doit aujourd’hui renouer avec ce type de réflexion pour faire face aux nouvelles réalités thermiques et écologique : pour l’architecte, ce doit être primaire et non plus secondaire.

 

Pensez-vous que nous soyons prêts à bouleverser nos critères esthétiques et notre manière d’appréhender l’espace domestique pour aller vers une architecture plus durable et rationnelle ?

Oui c’est déjà en cours : on voit bien qu’un bâtiment en béton apparent ne fascine plus grand monde. Aujourd’hui ces constructions évoquent rapidement des questions liées à leur trop forte empreinte carbone, à l’épuisement des ressources… Ces problématiques nous poussent à appréhender différemment leur esthétique.
En revanche, on va trouver plutôt beau et élégant un bâtiment en bois qui, intuitivement, va nous sembler plus écologique. Et pourtant, la question est bien plus complexe que ça : il faut faire très attention à ne pas prolonger une forme d’erreur – là encore héritée du post-modernisme – qui consiste à travailler de manière trop symbolique : il faut savoir que, dans le secteur du bâtiment, les trois quarts des émissions de CO2 sont dues au chauffage et à la climatisation, et non pas à l’empreinte carbone des matériaux. Si on réalise un bâtiment en bois mais mal isolé, les trois quarts du problème ne sont pas résolus. En ce sens, on voit souvent des bâtiments qui revêtent une image écologique de par leur aspect ou leurs matériaux mais qui ne le sont en réalité pas du tout, du fait de leur mauvaise isolation thermique.
En Suisse ou en Pologne – pays où l’isolation thermique est plus performante – la question du bilan carbone des matériaux commence à devenir importante, mais seulement car on a déjà réglé dans ces pays la question de l’isolation, primordiale. À ce moment-là alors, s’ouvre un tout nouveau champ esthétique.

 

Je repense au chapitre de votre exposition que vous consacrez au blanc utilisé pour ses propriétés réfléchissantes, notamment en Méditerranée : finalement, l’architecture vernaculaire n’est-elle pas justement l’expression d’une approche pratique et rationnelle, comme celle que vous défendez, et non pas culturelle ?

Beaucoup de solutions issues de l’architecture vernaculaire peuvent en effet être reprises. On réévalue de plus en plus la dimension pratique de certaines traditions que l’on trouvait simplement amusantes ou plaisantes d’un point de vue culturel. Le blanc des maisons en Grèce servait d’abord à réfléchir la chaleur, les fontaines en Espagne, au Maroc ou en Italie, permettaient de rafraichir l’air autour des places. Le rôle des animaux domestiques était avant tout de tenir chaud en hiver, les miroirs à l’intérieur des maisons servaient quant à eux à démultiplier la lumière des bougies. On trouve beaucoup de solutions pratiques dans les régimes d’énergie faible d’autrefois, et qui peuvent être actualisés aujourd’hui puisque nous entrons dans une ère de raréfaction des ressources.

 

Quel nouveau paradigme impose justement l’urgence climatique ? Comment cette approche scientifique permet d’appréhender différemment les choses ?

On peut répondre aux enjeux actuels à différentes échelles. Tout d’abord, à une échelle urbaine : nous avons réalisé plusieurs projets urbains ces derniers temps, dans lesquels nous avons pu intégrer la question du vent, celle de l’évaporation, de l’absorption de la chaleur… Que ce soit à Taïwan, à Milan, en Irak ou à Munich, nous tentons de contrer les îlots de chaleur urbains. Pour cela, il faut faire en sorte que la ville soit balayée par les vents, il faut penser les différences de température qui vont mettre l’air en mouvement, et considérer ainsi la ville comme une machine thermodynamique. On retrouve cette idée chez les Romains ainsi que dans l’architecture vernaculaire. Vitruve déjà préconisait de penser les plans des villes en fonction du vent, de définir la largeur des rues en fonction du soleil ; et non en termes de prestige. À un niveau architectural ensuite, on peut repenser l’architecture en changeant d’outil de composition, en choisissant les formes et matériaux en fonction de leurs propriétés thermiques, de leur emplacement dans l’habitat, de leur exposition au soleil. Il faut imaginer pouvoir moduler les volumes en fonction de contraintes thermiques et non symboliques ni esthétiques : il faut savoir mettre des plafonds hauts là où il fait chaud, des plafonds bas là où il fait froid…. Au niveau de la décoration intérieure enfin : on peut se reposer la question du tapis, des paravents, des rideaux, les imaginer avec des nouveaux matériaux, repenser leurs usages – je pense à ce titre aux pare-vapeurs ou à l’isolation thermique par exemple, qui réactualisent le sens de la décoration d’autrefois qui avait un rôle thermique là encore…

Vous avez enseigné pendant dix ans aux États-Unis, puis aujourd’hui à École d’Architecture de Versailles : quelle part de votre pratique dédiez-vous à la transmission et à la sensibilisation des nouvelles générations ?

L’enseignement des sciences naturelles, notamment de la climatologie, me semble aujourd’hui essentiel dans les études d’architecture.

Dans l’exposition au Pavillon de l’Arsenal, des ateliers pour enfants ont été proposés, avec des titres volontairement très simples, comme ceux employés pour les chapitres de mon livre. Ces titres simples se donnent de sortir de la complexité vantée par les post-modernistes (1970-2019), qui – parce qu’ils ne voulaient plus expliquer, mais seulement comprendre, parce qu’ils avaient abandonné les causalités matérielles – ont été dépassés par le surgissement du réchauffement climatique ou la pandémie actuelle qu’ils n’avaient absolument pas prévus. « Comment un simple grenier est-il à l’origine des villes ? » ou encore « Pourquoi les petits pois sont-ils à l’origine des cathédrales ? » : l’intérêt est de montrer comment les régimes alimentaires des êtres humains et des animaux à partir de l’an 1000 ont permis d’un coup la transformation de la civilisation occidentale et notamment la construction de cathédrales… Pourquoi ne dit-on jamais que l’évolution du régime alimentaire liée au progrès de l’agriculture a effectivement permis ça, et pas seulement la foi ou des idées morales et politiques ? Que si New York est haut, c’est grâce au charbon qui a permis de fondre, de transporter, d’élever l’acier nécessaire aux gratte-ciels. Ce sujet, parmi bien d’autres, qui fait l’objet d’un atelier pour enfants, cherche à illustrer cette relation entre la grandeur des ouvrages et le type de régimes alimentaires, à recréer ainsi des connexions réelles et rationnelles, plus simples que les idées défendues par le post-modernisme.

INFORMATIONS PRATIQUES

Texte — Emmanuelle Oddo
Photos — Philippe Rahm architectes

LA SAGA : MÉLISSA NOUS FAIT DÉCOUVRIR…

Quand Mélissa nous fait découvrir… Vaste Horizon.
Profitons de l’été pour nous évader et faire le tour des architectures les plus remarquables qui font rêver l’équipe ARCHIK !

Avant de rejoindre l’équipe ARCHIK, Mélissa a déjà vécu de nombreuses vies. Entre des études de commerce à Lyon, un passage par une agence de communication et de publicité dans le secteur du luxe à Paris et une expérience chez Christie’s à Londres, elle a aussi créé une marque d’objets de décoration… Un parcours impressionnant pour cette jeune femme, désormais marseillaise sensible à l’esthétisme, passionnée d’art, d’architecture et de design qui trouve naturellement sa place au sein de l’équipe d’ARCHIK en tant que directrice de marque.

Pour cette saga, Mélissa nous invite à passer une nuit dans une galerie.

Architecture du XVIIIeme siècle ayant conserver les vestiges du XIII Faisant le charme du lieu , vaste horizon est une maison d’hôtes galerie discrète et intimiste. « Une adresse que l’on se passe sous le manteau, où que l’on garde jalousement ». Composée de 4 chambres dont un appartement avec terrasse privée. Chacune se pare de son propre style avec un décor à emporter signé par des artistes et designer soigneusement sélectionnés.

Vous serez réveillé par le parfum des madeleines sortant du four faites par Anne notre hôte qui vous fera découvrir ces talents de cuisinière dans la cours ombragée et secrète. Un délice pour les yeux et les papilles. En fin de journée après une escapade dans la belle ville d’Arles, retrouvez une ambiance feutrée dans le salon bar qui s’habille de bois : une ode à Hemingway. Il y fait bon de déguster du vin en écoutant la musique provenant du tourne-disque lové dans l’un des fauteuils chinés en velours par @julie_barreau.

Anne et David vous reçoivent avec convivialité et générosité dans une atmosphère élégante et singulière rythmée par une sélection d’ œuvres et de pièce de mobilier toujours plus pointue.

SAVE THE DATE
Axel CHAY designer ayant œuvré pour la Maison ARCHIK s’approprie la suite terrasse à découvrir avec l’exposition dans la cour de Marion MAILLANDER dès le 26 septembre.

ON AIME

Le regard avisé d’Anne et la proximité dans l’intimité d’œuvres d’art.

Ma dernière acquisition l’une des splendides lampes de Kalou DUBUS

INFORMATIONS PRATIQUES

Vaste Horizon
11 rue Bibion
13200 ARLES

Site web
Crédit photo – © Jean Marquès

LA SAGA : SABRINA NOUS FAIT DÉCOUVRIR…

Quand Sabrina nous fait découvrir… le Monte-Carlo Beach.
Profitons de l’été pour nous évader et faire le tour des architectures les plus remarquables qui font rêver l’équipe ARCHIK !

Sabrina fait ses armes dans le secteur des médias à Paris et manie l’art de la communication. En 2007, elle fait le choix d’un changement de décor : Monaco et l’hôtellerie de luxe lui tendent les bras. Elle entre alors au département Marketing et Communication de la Société des Bains de Mer, où elle découvre véritablement l’esthétisme de l’architecture. Son déclic ? Une collaboration avec India Mahdavi sur le Monte-Carlo Beach. À travers la communication, elle développe son goût pour le beau et s’immerge dans un esthétisme global, qui la suivra pendant longtemps… et jusqu’à Paris, puisqu’elle rejoint cette année l’aventure ARCHIK en tant que Directrice d’Agence.

Pour cette saga, Sabrina revient à ses premiers amours et nous propose donc de découvrir ensemble l’architecture du Monte-Carlo Beach.

Cet hôtel 5 étoiles symbolise la « révolution culturelle » des années 20, d’une clientèle qui ne fuit plus le soleil. On entreprend l’aménagement d’une plage, une piscine olympique ainsi que d’un hôtel « pieds dans l’eau ». Son lancement est confié à Elsa Maxwell, dont la culture importée des États-Unis est en vogue. Célèbre chroniqueuse, écrivain et organisatrice de soirées mondaine, Elsa Maxwell est PR avant l’heure. Le Monte-Carlo Beach devient ainsi le nouveau rendez-vous de l’élite artistique, musicale et culturelle. En 1929, l’œuvre est achevée par Roger Séassal, conçu à la manière des villas californiennes dans un style Art Déco très pur. La géométrie incurvée du Monte-Carlo Beach épouse le littoral et le place à l’ombre de la pinède. La sobriété de la façade en fait un lieu de charme intimiste au luxe discret et élégant, qui a de suite séduit Sabrina.

Pour son 80ème anniversaire en 2009, le Monte-Carlo Beach fait peau neuve et confie sa décoration à India Mahdavi, qui réinterprète l’hôtel comme une « ode à la Méditerranée ». De plus, la pinède s’invite sur la plage et un nouvel environnement végétal, imaginé et conçu par Jean Mus, berce désormais l’hôte dans sa promenade balnéaire. Quoi de mieux pour un été indien ?

ON AIME

La dolce vita tournée design

INFORMATIONS PRATIQUES

Le Monte Carlo Beach

Site web
Crédit photo – © Christophe Bouthé

LA SAGA : VANESSA NOUS FAIT DÉCOUVRIR…

Quand Vanessa nous fait découvrir… le Centre Pompidou.
Profitons de l’été pour nous évader et faire le tour des architectures les plus remarquables qui font rêver l’équipe ARCHIK !

Négociatrice au sein de la Maison ARCHIK de Toulouse, Vanessa aime arpenter la ville rose à la recherche du bien rare, se projeter dans l’espace, échanger ses impressions avec ses clients et écouter les leurs. Ce qu’elle préfère à Toulouse ? La vie des places animées de jour comme de nuit, comme celle de la Trinité ou Salengro. Pour cette saga, Vanessa nous emmène alors tout naturellement dans un lieu urbain et plein de vie… et plus précisément à Paris !

En plein cœur du 4e arrondissement, un monument se dresse. Intriguant, hors-norme, unique. Le Centre Pompidou, centre national d’art et de culture, a été initialement pensé par le président Georges Pompidou. Un concours d’architecture a alors rapidement été lancé en 1971, réunissant 681 candidats, et dont le jury était présidé par Jean Prouvé. Deux architectes, Renzo Piano et Richard Rogers, alors inconnus, le remportèrent. S’ils ont tous deux poursuivis leurs carrières respectives après ce grand projet, ce dernier leur a permis d’affiner leur type d’architecture : Richard Rogers est resté fidèle à l’esprit high-tech du Centre Pompidou alors que Renzo Piano a beaucoup plus œuvré à l’intégration de l’architecture dans son environnement.

Vanessa est encore aujourd’hui séduite par son architecture. Le verre lui donne une dimension encore plus spectaculaire depuis l’intérieur, lui offrant des vues sur les toits de Paris. L’innovation dans l’architecture du Centre Pompidou ? Ce qui est habituellement caché, est mis à nu. Le bâtiment en lui-même devient alors la première véritable œuvre que l’on visite à Beaubourg. Alors, partants, pour des vacances culturelles ?

ON AIME

L’aspect novateur à l’époque

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Le Centre Pompidou

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Crédit photo – © Juliette Jourdan & Centre Pompidou

LA SAGA : CARI NOUS FAIT DÉCOUVRIR…

Quand Cari nous fait découvrir… la Sheats Goldstein Residence.
Profitons de l’été pour nous évader et faire le tour des architectures les plus remarquables qui font rêver l’équipe ARCHIK !

Cari est une femme aux nombreuses influences. Portoricaine de New-York, elle crée son atelier à Brooklyn dès la fin de ses études artistiques et commence à exposer ses travaux. À Marseille depuis 15 ans, elle rejoint ARCHIK l’an dernier et découvre la perméabilité entre l’architecture, le design, et l’immobilier. Incollable sur l’architecture de Rem Koolhaas ou sur l’art conceptuel de Lygia Clark, Cari est sensible aux œuvres utopiques et contemporaines.

Rien d’étonnant qu’elle nous propose aujourd’hui de découvrir ensemble l’œuvre tout à fait avant-gardiste de John Lautner : la Sheats Goldstein Residence.

Ayant vu le jour entre 1961 et 1963, cette maison a été conçue pour Paul et Helen Sheats, respectivement médecin et artiste, et fans de la première heure de l’architecture de John Lautner.

Si la Sheats Goldstein Residence est l’une de ses réalisations les plus populaires, ce sont ses nombreuses perspectives qui interpellent Cari. Son toit triangulaire et ses plafonds en béton moulé en font presque une résidence futuriste, quand son lien très étroit avec son environnement nous rappelle l’approche « tropicaliste » d’Oscar Niemeyer.  Connu pour sa radicalité et son audace, John Lautner utilise un bon nombre de ses matériaux de prédilection dans la construction de cette maison : le béton, le bois, l’acier ou encore le verre. Cari la voit alors comme « une chorégraphie de sensation des d’évènements : entre la légèreté et l’ancré, la transparence et l’opacité, la nature et l’artificiel. »

ON AIME

La radicalité de l’architecture

INFORMATIONS PRATIQUES

La Sheats Goldstein Residence

Crédits photos – © Gaelle Le Boulicaut & Tom Ferguson Photography